Pourquoi je ne parle pas de queer en IMS
Par Arthur Milchior le mercredi 8 juillet 2015, 11:10 - Intervention en milieu scolaire - Lien permanent
Un jour que je parlais d'IMS à quelqu'un, j'expliquais que nous faisions des interventions contre les LGBT, oubliant le mot phobie. Rectification faites, je rajoute dans la discussion qu'on parle d'autres sujets, tels que les A (agenre, asexuel, aromantique) et I (intersexe).
Un peu plus tard, j'entend cette personne dire à une autre que le parle de LGBTQIA+phobie. Ce sur quoi, mon côté pointilleux me force à l'arrêter[1]. Qu'est-ce que Q fait là ?
Dans ce sigle à rallonge, Q peut avoir deux sens. Dans certains endroit, c'est «questionning», ou «en questionnement». Mais c'est rare, et je n'ai jamais entendu parler de questionningphobie. Des associations peuvent le rajouter pour dire aux gens «vous êtes pas forcé de vous définir, de savoir exactement dans quel case vous êtes».
Mais le plus souvent, Q signifie queer. Et je ne parle pas de queer en IMS. Je crois qu'aucun élève ne m'en a jamais parlé, et nous n'abordons pas ce sujet. Ce qui pose la question: pourquoi on en parle pas.
Note
[1] ce qui est bête, je devrai laisser les gens me présenter sous un jour positif
D'abord, je ne parle pas de Queer car je saurais pas quoi dire. Avez vous lu l'article wikipédia queer ? Laissez moi vous citer le premier paragraphe:
Queer est un mot anglais signifiant « étrange », « peu commun », souvent utilisé comme insulte envers des individus gays, lesbiennes, transsexuels… Par ironie et provocation, il fut récupéré et revendiqué par des militants et intellectuels gays, lesbiennes, transsexuels, bisexuels, adeptes du BDSM, fétichistes, travestis, transgenres ou toute personne refusant la catégorisation du genre, de ses sentiments amoureux et/ou de sa sexualité. Ce terme est apparu à partir des années 1980, selon le même phénomène d'appropriation du stigmate que lors de la création du mot négritude. Il est utilisé comme titre de roman partiellement autobiographique par William S. Burroughs en 1953 (publication en 1985), qui y parle de son homosexualité.
Le premier paragraphe, c'est celui qui facilite la lecture en expliquant de quoi ça va parler de manière informelle... La suite est pire. Alors allez expliquer ça a des lycéens. À la réflexion, je serai bien incapable d'expliquer le concept de queer à qui que ce soit. D'autant que certains disent que le principe de queer est de n'avoir pas de définition.
Ensuite, je ne parle pas de Queer, car je n'ai vu personne le faire. D'ailleurs, c'est le Mag Jeunes LGBT, et pas Jeunes LGBTQ... d'un autre côté c'est pas LGBTQIA, et on parle de I et de A. Mais ça ne suffit pas comme argument, je n'ai vu personne parlé d'agenre ni d'asexuel la 1ère fois que j'ai rajouté ce mot en IMS, et ça ne m'a pas empêcher d'en parler.
Selon un ancien magueur, la question de rajouter Q au nom du mag a été posé en AG. Il était contre pour la raison suivante, que je reprend à mon compte pour les IMS: Queer, ça se choisit. On ne décide pas d'être homo, on décide de l'assumer ou pas, on ne choisit pas d'être intersexe, on nait comme ça, on ne choisit pas d'être trans, on choisit ce qu'on fait derrière selon les contraintes des avancées médicales et sociales. Par contre, Queer, c'est une revendication, c'est politique, c'est militant, la personne choisit - ou pas - de se dire queer et de s'approprier cette étiquette. Pour citer un billet récent, le Queer sera celui qui donne la mauvaise image. Le Mag ne lui est pas interdit, heureusement, mais ce n'est pas non plus la première personne visé par cette association. Et en tout cas, ce n'est pas du queer que nous avons envie/besoin de parler le plus en IMS.
Maintenant, si quelqu'un me lit, pense que je me trompe et a une idée qu'il hésite pas à la donner en commentaire au mag, car on a jamais assez d'intervenants.
Commentaires
Mauvaise foi, tu parles pas de cuir parce que tu préfères le latex, tout le monde le sait.
Merde j'aurais dû écrire LaTeX sinon personne va comprendre;
Pour avoir grandi dans les années 90/2000, j'ai surtout entendu parler de l'association en question sous la version de quatre lettres (LGBT).
De manière plus récente, J'ai vaguement assisté à ce qui ressemble à une inflation onomastique (ce n'est pas sexuel, je précise).
Je comprend tout à fait que son identité et ses buts évoluent, mais il me semble rarissime de voir un nom de personne morale évoluer progressivement au fil du temps. D'ordinaire, les changements de noms sont intégraux, instantanés.
Quels sont les risques?
Perte de lisibilité : LGBTIAAAOMGWTFBBQROTFLCOPTERPTDR...
Difficultés d'identification : Comparons une association qui aide les homosexuels à la rue à un domaine bien particulier de la Physique, par exemple la diffraction de la lumière par les prismes. Au fur et mesure que la physique progressa, on a restructuré des domaines apparemment sans liens en ensembles plus vastes, plus cohérents (toute l'optique, le magnétisme, l'électricité... => Physique moderne). Ce qui nous permet, entre autre chose, de parler de physique en se contentant de dire le mot "Physique" sans avoir à énoncer chacun des domaines qui la composent.
Tout ça pour les questions suivantes : à mettre en avant 36 000 spécificités individuelles distinctes, est-ce que ça ne va pas finir par poser problème? Ne serait-il pas intelligent de restructurer l'identité du mouvement, de mettre en avant les points communs à tous et d'insister sur ce qui rassemble, plutôt que de vouloir nommer chacun, et - fatalement - en oublier, ou assommer son auditoire avant d'avoir terminé?