Comme je l'ai déjà dit 2 fois, je n'aime pas le sketch intitulé "Le même homme", celui à propos de l'homosexualité. Je pense qu'il me sera utile d'indiquer ce que je me reproche.
Tout d'abord, pour répondre au créateur fou, je ne suis pas soudainement devenu homophobe. Je le suis depuis plus d'un an et c'est pas moi qui le dit, c'était une personne de chez AIDES[1] à qui j'ai refusé de faire un don. Mais ce n'est pas le sujet.
La première question est: à qui est-ce que je m'adresse. Comme je ne choisis pas mon publique il faut s'adresser majoritairement
- aux hétéros, qui n'ont pas forcément réfléchis aux questions gays pour la plupart,
- aux homos qui savent qu'ils sont homos - qui n'ont pas forcément beaucoup réfléchi non plus -,
- à ceux qui ont réfléchis sur les questions d'identité de genre et de sexualité, qui est le publique qui exigerait le plus de moi car ils seraient capable de relever mes erreurs (je ne crois pas avoir encore eu ce type de personne comme spectateurs, et je le regrette)
- et enfin les homos qui ne s'assument pas, c'est ceux qui me font le plus peur car j'aimerai que ce sketch puissent les aider, comme peuvent les aider Fur-Piled ou les chansons de Nicolas Bacchus... Mais c'est dur et pour le moment, c'est raté !
Faire un sketch engagé, ça nécessite de savoir quel idée défendre exactement, et il faudrait déjà que je sois certain de mes idée. En tant que mathématicien, j'ai du mal, car j'ai souvent l'impression que la grande famille des queers proposent des idées complètement contradictoire. Par exemple, comment concilier, d'une part:
- l'égalité totale des sexes et défendre que le genre d'une personne n'a AUCUNE raison d'influer sur la vie de quelqu'un à part pour les raisons biologiques
- Que les gens veulent que la société les reconnaissent comme étant d'un genre qui n'est pas naturellement le leur.
Bien sur, en premier lieu, il y a le mariage homosexuel; et tout ce que ça implique au niveau de l'adoption, de l'immigration, des impôts, de l'héritage, des droits familiaux... Là, je crois qu'un sketch peut-être un bon moyen pour faire comprendre les problèmes que nous avons.
Pour l'immigration, je disais à propos du problème qu'on les gens pacsés pour rester en France: "Déjà qu'ils sont étranger, si en plus ils sont homo, il ne faut pas exagérer! Ils le font exprès ou quoi ?"
Et plus tard je me suis rendu compte que réduire le problème de l'immigration à celui de l'immigration des homos, c'est dégueulasse. Il y a de sérieux problème avec l'immigration dans ce pays [2] et il serait extrêmement égoïste de réclamer un droit réservé uniquement à nos amoureux.
Pour l'adoption, il faut distinguer entre ceux qui adoptent l'enfant de leur partenaire, et les couples qui adoptent un enfant d'une tierce personne; deux problèmes totalement différents qui sont trop souvent mis dans le même panier. Mais comme l'intérêt de l'enfant prime dans l'adoption, je pense que faire un sketch qui parle des homos qui veulent adopter ne servirait à rien; il faudrait plutôt faire un sketch du point de vu de l'enfant - ce que je ne me sens pas capable de faire car je ne connais pas d'enfant de couple homo et que je ne sais pas du tout quels sont leurs spécificités.
Pour l'impôt et l'héritage, ça a de nouveau changé récemment, et c'est probablement le point le plus simple à défendre, l'égalité pécuniaire. Etiquement, il n'y a pas grand monde qui admettra qu'ils se marient pour l'argent.
Ensuite, dans un tel sketch, j'aimerai combattre les clichés.
Par exemple: homo=folle, que j'attaque avec "des gens pensent que tous les gays sont efféminés, c'est faux. Je dirai même plus, dans chaque gay, il y a un homme ! On est pas fondamentalement différent" etc. Mais je réalise que la partie du sketch où je joue une folle est beaucoup trop longue; j'aurai peur que ça ne mette mal à l'aise des gens et que ceux qui regardent une minute sur youtube (ce qui est déjà beaucoup) pensent: encore un autre qui se croit drôle avec ce cliché !
Attention, entendons-nous bien, ça ne me dérange pas de mettre des homophobes mal à l'aise[3]. C'est le contraire, beaucoup de gays rejettent les folles car elles donnent une "mauvaise image" de nous autres les gays, à tel point que certains gays se croient obligé de préciser être "hors milieu" ou encore que ça ne se "voit pas". Ce qui est particulièrement problématique pour tout ceux qui n'osent pas s'assumer comme gay, que ce soit car ils savent qui ne ressemblent pas aux folles, ou parce qu'ils ont peur de "devenir folle" et donc ridicule[4]. Et c'est pour eux que je pense qu'il est important de dire que gay n'est pas égale à folle.
Bon, si c'était la seule chose à dire sur les folles, ça irait encore, sauf que, des gays efféminés, il y en a, et je n'ai aucune envie de dire du mal d'eux. Historiquement, c'est les premiers à s'être publiquement assumés et à avoir permis l'avancé de nos droits[5] et si certains ont l'impression que c'est leur vraie nature, je n'ai aucune raison de ne pas respecter ce choix. Pourvu qu'eux même respectent le fait qu'on puisse être gay sans être folle, et ne pas prétendre, comme certains, qu'on ne s'assume pas vraiment si on ne vit pas comme eux.
Sur ce point là, je pense que la réponse est simplement de "montrer" des homos, sans particulièrement appuyer sur l'homosexualité. C'est déjà ce que j'essaye de faire dans la vie de tous les jours, mes proches me savent gay, mais je ne crois pas tomber dans quelques clichés gay que ce soit. Et c'est ce que font depuis quelques temps déjà les Lascars Gay, un duo d'humoristes, animateur du fieald. Ils ont des personnages qui sont un couple de gays, ils nous montrent ces personnages évoluer, on voit qu'ils sont homo, mais c'est rarement le sujet même de leurs sketchs. Ou on peut aussi suivre la route d'Océane Rose-Marie, aussi connue sous le nom de la lesbienne invisible, et choisir de faire un stand-up où on raconte la vraie vie des gays, en dépassant les clichés.
Il y a aussi plein d'autres discriminations à mettre en avant, le don du sang par exemple. D'ailleurs j'en parle... mais j'en parle mal! Au lieu de parler de l'origine de la discrimination, qui implique que les homos ont tous des sexualité à risques - alors même qu'on trouve aussi des couples stables homos - je parle d'anecdotes liés à la façon dont les questions sont posé au Québec. Certes, l'anecdote est drôle; d'ailleurs je crois qu'elle a fait rire, mais elle évite totalement de traiter du vrai sujet.
Il y a l'organisation hétérocentrée de beaucoup de chose, les toilettes publiques sont l'exemple canonique, mais vous comprendrez que j'ai préféré parlez des vestiaires, c'est un peu moins sale.
On peut aussi parler de l'art. Il y a deux points qu'il faut mettre en avant. Le premier c'est la très faible quantité d'œuvres d'arts avec des homos dans les grands média[6], d'ailleurs même les artistes ouvertement homosexuels tels que Dave et Roch Voisine, chantent toujours l'amour des femmes[7] et parmi les rares chanteurs qui parlent d'homosexualité, c'est trop souvent à la troisième personne, donc ça devient beaucoup plus dur de s'identifier. Adam & Yves de Zazie, Petit Pédé de Renaud, Un Homme ou Une Femme d'Axel Red, La Différence, de Lara Fabian, ou encore Les Deux Hommes de Lynda Lemay, qui nous habitue plutôt à chanter à la première personnes les histoires dures qui ne sont pas les siennes[8]. La palme de l'hypocrisie revenant selon moi à Patrick Bruel qui a transformé Mon Amant de Saint-Jean en Son Amant de Saint-Jean pour être bien sur qu'on ne le prenne pas pour un homo. Bien sur, on peut trouver des exceptions, Comme ils disent, d'Aznavour, Léopold des Cowboys Fringants et Entre Elle et Moi, duo de Véronique Sanson et Catherine Lara, Mon Petit Mec et Moi des Wriggles et aussi Le Privilège, magnifique chanson de Didier Barbelivien[9] du répertoire de Michel Sardou. Mais ça reste trop rare.
Le deuxième point à évoquer, c'est la faible quantité général des œuvres gays; encore que des associations et des petites maisons se spécialisent sur ce sujet de niche. Mais même en allant chercher parmi les chanteurs moins populaires, il y a encore peu de chansons et beaucoup de sujets importants non abordés. En plus, les chansons de chanteurs peu connu, forcément, c'est plus dur d'en rire dans un spectacle, si je cite À quoi ça tient de Romain Didier, Nicole et Nicolas d'Allain Leprest ou encore toutes les chansons gays de Nicolas Bacchus, la majorité du publique ne connaitra pas.
Je fais une digression sur la chanson car il y en a beaucoup à la télé, à la radio, dans les soirées, etc... Mais la même remarque peut s'appliquer aux romans(en particuliers aux romans d'amour type Arlequin), aux bandes dessinées, dessins animés, etc. Par exemple, dans Sailor Moon, dessins animé japonais passé au club Dorothée avec des héroïne qui sauvent le monde et ont des tenus "sexy". Il y avait un couple gay, et 2 sailors étaient lesbienne; ça a été censuré[10]. Certes, je parle de bêtise, la chanson d'amour est le genre le plus stupide, le roman Arlequin n'a aucune qualité littéraire, etc... Mais ça reste quelque chose qui a été très présents dans la vie d'énormément de gens, et ça ne peut pas n'avoir eu aucune influence !
Enfin il faut parler de la vie courante. Et là c'est très insidieux car c'est parfois tellement intériorisé qu'on ne s'en rend pas compte, et quand on s'en rend compte c'est encore plus dur à expliquer aux hétéros qui pensent qu'on monte des riens en épingle - car il est vrai que ce n'est qu'une somme de petit rien, qui au final font beaucoup.
Un exemple dont j'ai beaucoup discuté récemment, c'est les cours de Rock donné dans mon école, ou forcément, les professeurs supposent qu'on veut danser avec un individus de sexe opposé. Savoir ce qu'on doit faire à ce moment là n'est pas du tout évident. Je vous préviens, mon questionnement à ce sujet est très long.
Par exemples les gens supposent toujours qu'on est hétéro et le montrent sans s'en rendent compte, par exemple en se croyant gentil et en demandant "tu as une petite amie ?" sans rajouter "ou un petit ami ?". Et souvent, ils croient que, sous prétexte qu'on ne cache pas qu'on est un peu différent, ils ont le droit de nous poser des questions sur ce sujet. En dehors des questions sur la sexualité, que je compte épargner aux lecteurs et aux spectateurs, il y en a 3 qui reviennent tout le temps:
- "Tes parents sont au courant"
Je n'ai jamais compris Pourquoi tant de monde me demande s'ils le savent
C'est une grande question qui en général ne possède pas de réponse. Je m'en moque en la reformulant en une question similaire (qu'on m'a vraiment posé): "qu'est-ce que ça a de plus", puis en répondant à la question "pourquoi" avec des réponses fausses mais qui ont le mérite d'être drôle.
- "Comment tu as su que tu étais gay ?"
La réponse la plus simple, c'est de signaler que ça deviendrait ridicule en disant "Comment tu as su que tu étais hétéro ?". Sauf que l'argument est fallacieux, comme on suppose toujours que les gens sont hétéros, ils sont très peu à se demander s'ils le sont ou pas, alors qu'il est très rare que les homos le savent depuis toujours qu'ils sont homo, donc le processus n'est pas trivial et peut effectivement être intéressant à raconter...
Et en plus ça passe totalement à coté d'un autre sujet important, mais autrement plus complexe, la sexualité n'est pas binaire. Il y a les bisexuels, ça c'est encore simple, il y a les pansexuels[11], il y a les questions de physique, de mental. Est-ce qu'on est "sensé" être attiré par les trans mâle vers femelle, femelle vers mâle, les garçons manqués, les efféminés... ? L'absurdité de la question est contenu dans le mot "sensé" appliqué aux désirs et à l'amour, pourtant le mot "gays" est réducteur et est supposé contenir les réponses à ces questions.
Tout cela vient bien sur du fait qu'il y a moins d'homos que d'hétéros, ce qui créé aussi une difficulté pour ce trouver un petit ami, je ne peux pas faire l'impasse sur ce sujet. Mais comme il est parfois dur pour les hétéro de se trouver une copine, je pense que, finalement, on est assez égal dessus. C'est le passage le plus simple du sketch, le plus bon enfant, et je l'aime bien !
Voilà tout ce que je voulais faire; sans pour autant que ce sketch apparaisse lourd et trop "engagé"(ce qui est aussi raté, des personnes qui ne sont pas homophobes me l'ont reprochés), et vous pouvez voir que j'en suis loin ! Voilà pourquoi, je N'aime PAS Le Même Homme !