Pourquoi je voterai au second tour

Ce qui suit est mon raisonnement pour l'instant; en aucun cas je ne prétend dire aux autres quelle est la bonne conduite à tenir. J'ai voté au premier tour, je voterai au second tour, mais je comprend totalement qu'on puisse juger plus utile de s'abstenir.

Je lis beaucoup de gens qui disent détester les deux choix proposés au second tour. De gens qui déclarent publiquement qu'ils voteront blanc ou s'abstiendront. J'ai pendant quelques minutes pensé suivre cette voix moi aussi.

La présidence apporte certains pouvoirs, mais à aussi un énorme poids symbolique. Je m'y connais franchement pas assez en politique, en économie, pour vraiment me rendre compte de si l'un sera vraiment pire que l'autre une fois qu'il/elle aura les pouvoirs que la constitution et la loi lui donne. D'autant que pas mal d'analyse semblent dire qu'aucun-e des candidat-e-s n'aura de majorité à l'assemblée nationale, donc -avec un peu de chance- les pouvoirs seront assez limités...

Par contre, au niveau du symbole, j'ai déjà une meilleure idée des conséquences. Je repense aussi à ce que j'ai lu de ce qui arrive là où Trump, le Brexit, ou un maire FN est passé. Cela libère des paroles, augmentent le nombre de violences, verbales et physiques, que se permettent les racistes. Notons au passage que ce sont des violences qui, à priori, ne me toucheraient pas directement. J'ai l'immense privilège de n'être jamais visé par les racistes.

Donc, je me disais: j'ignore si j'ai envie de voir Macron passer. Mais en y repensant, je réalise que laisser Le Pen passer aurait un coût; et la majorité de ce coût - le coût le plus direct - je n'aurai pas à payer moi-même. Je me trouverai alors très hypocrite de dire que j'accepte ce coût. Le fait que je connaisse des gens qui subissent le racisme et qui préfèrent aussi s'abstenir ne changeant rien à ce raisonnement.

Commentaires

1. Le lundi 24 avril 2017, 13:02 par Dominique

Bonjour milchior, ceux qui ne votent pas en se disant non concernés me rappellent l'histoire moult fois entendue: "je ne suis pas juif, donc je n'ai rien dit lorsque mon voisin juif a été arrêté, je ne suis pas communiste, alors je n'ai rien dit lorsque mon voisin communiste a été arrêté, je ne suis pas gay donc je n'ai rien dit lorsque mon voisin gay a été arrêté... lorsqu'ils sont venus m'arrêter, il n'y avait plus personne pour protester!" les hommes (et les femmes!) ont la mémoire courte, nous ne sommes jamais à l'abri d'un retour de manivelle! Le loup se fait souvent agneau pour dévorer les brebis! Restons vigilants et ne nous laissons pas berner par de belles paroles.

2. Le lundi 24 avril 2017, 18:53 par Athreeren

Faut-il voter ? La première partie de ce texte donne un argument intéressant : http://slatestarcodex.com/2016/09/2... Je ne sais pas ce qu’il vaut dans le cas de notre élection.

Voici ce que je pense concernant les chances de chaque candidat d’obtenir une majorité à l’Assemblée Nationale. Le Front National n’a jamais obtenu plus d’une poignée de députés hors d’un système d’élections proportionnelles. Une victoire de Marine Le Pen lui en accorderait surement plus, mais pas tant que ça. Il lui serait par contre possible d’organiser un référendum pour que les élections soient désormais à la proportionnelle, puis de dissoudre l’Assemblée et d’organiser de nouvelles élections qui lui seraient plus favorables. De même, la présidente Le Pen pourrait demander par référendum si les Français veulent sortir de l’Union Européenne, et puisque ce serait dans un scénario où le FN a remporté les présidentielles, la réponse serait oui sans aucun doute. Quant à Emmanuel Macron, n’ayant pas de parti, il ne peut pas avoir de majorité. Et je crois qu’il s’est bien gardé d’expliquer comment il comptait gouverner. J’imagine que dans tous les partis, certains candidats feront campagne pour travailler avec le président Macron, et d’autres pour limiter le pouvoir du président (là où dans le cas d’une victoire de Le Pen, tous les principaux partis à l’exception du FN feraient tout pour la bloquer). J’imagine que la plupart des députés voteront pour la part du programme de Macron qui est conforme aux valeurs de leur parti et contre les autres. Ce qui signifie que pour la première fois depuis 2000, les élections législatives seront plus que la confirmation de l’élection du président. Quel que soit le vainqueur dans deux semaines, ce sera une situation inédite, comme quand le PS a perdu les législatives de 1986, inventant de fait le concept de la cohabitation sous la Ve République ; ce serait la première fois qu’une cohabitation aurait lieu dès l’élection du président.

Et, oui, au niveau du symbole… J’ajouterais qu’une victoire de Geert Wilders aux récentes élections néerlandaises aurait certainement augmenté le nombre de voix de Le Pen, et de la même façon, une victoire de Le Pen maintenant aurait une forte influence sur les élections allemandes, et dans une certaine mesure sur les élections britanniques.

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